L'assistante prononce plusieurs fois mon nom de famille tout bas, entre ses dents, joue avec sa sonorité. À chaque répétition, mon nom se transforme, s'altère, il ne ressemble déjà plus au paysage d'où il vient. Elle garde finalement deux sons, qu'elle dessine dans l'air avec son index, cherchant quelle écriture leur donner parmi les myriades de caractères qu'ils appellent. L'assistante me demande ce que signifie mon prénom - son étymologie, son histoire. Pour le traduire, elle choisit un pictogramme qui évoque la beauté et la royauté : le jade. Elle lui joint en deuxième caractère le calme, la sérénité. Je lui avoue que c'est une vertu que je ne possède pas. Elle me répond que c'est bien là l'intérêt de la placer dans mon nom : me conduire à la cultiver. Enfin, pour le troisième caractère, qui sera placé en premier, elle choisit la saison où je suis née. Reste à compter l'ensemble des traits qui composent les trois caractères et à vérifier si ce chiffre porte bonheur, si le nom est propice. Le comité retient son souffle : 41. C'est un très bon chiffre, qui appelle d'heureux présages. Le nom est donné. L'assistante le recopie sur tous les papiers administratifs et dans mon carnet pour que je puisse le montrer. J'ai été nommée à Taipei. Je ne croyais pas si bien dire. Une douce chaleur vient dissiper un peu mes brumes. Au milieu de l'hiver taipéien, on m'a appelée Été." Cernée par la mer et par la Chine, Taïwan est une île. Dans ce territoire des confins, en sursis, il faudra que Xia, qui ne s'appelle pas vraiment Xia, mène sa quête, quitte à se désagréger, s'oublier, pour pouvoir ensuite se recomposer comme les fragments d'un nouveau langage.
LE GOUT DE PARIS640/mainssl/modules/MySpace/PrdInfo.php?sn=llp&pc=2502002048390
LA VIE OSSECAILLE1,100/mainssl/modules/MySpace/PrdInfo.php?sn=llp&pc=2502101140001
VOYAGE A PIED DANS LA HAUTE-DROME"Ai fait environ 170 km à pied à travers la haute Drôme. Ai écrit au jour le jour les notes de ces étapes." Cette indication du 27 juillet clôturant le Journal de Jean Giono pour l'année 1939 laissait sur leur faim les lecteurs désireux de ne rien ignorer des pérégrinations pédestres de l'homme de Manosque et du Contadour. Mais voilà que, quatre-vingt-cinq ans plus tard, à la faveur d'une heureuse trouvaille dans les archives d'une juridiction d'exception de l'Occupation, le modeste cahier manuscrit de ce "voyage à pied en Haute-Drôme" refait surface... Et il nous offre le témoignage émouvant, spontané et puissant d'un Giono qui ne conçoit le travail romanesque que plongé dans la substance du monde et la géographie humaine, telles que l'appel de la marche y conduit - dans ce "pays étrange", à l'écart des terres familières, laissant deviner "un diabolisme souterrain". L'écrivain consigne ici ses observations, ses sensations ainsi que ses réflexions sur la création littéraire... qui le mèneront, quelque dix années plus tard, à l'écriture de l'un de ces chefs d'oeuvre, Les Grands Chemins, le grand roman noir de l'amitié.830/mainssl/modules/MySpace/PrdInfo.php?sn=llp&pc=2501091140002
KODAK EVEREST POCKET" Cherche antique appareil photo égaré sur l'arête nord-est du Devadhunga. Je n'ai jamais entendu parler du Devadhunga. Pourtant, j'ai suffisamment écumé les montagnes des sept continents pour que ma géographie alpine soit rarement prise en défaut. Je pianote sur mon ordinateur et Internet rend son verdict : le Devadhunga a été le nom provisoire du pic XV jusqu'à ce que la Société géographique royale décide de le baptiser du nom de son plus illustre arpenteur général : George Everest. Alors je comprends que l'auteur de l'annonce cherche le Kodak Vest Pocket d'Irvine et Mallory. La chance de ma vie s'offre à moi, je ne la laisserai pas passer." Avec cette nouvelle enquête romanesque, Nicolas Le Nen entraîne le lecteur dans les pas de Sandy Irvine et de George Mallory, sur l'arête nord-est de l'Everest. Ce livre au suspense haletant, parfaitement documenté, nous donne les clefs pour tenter de résoudre, après un siècle de mystère, la plus grande énigme de l'histoire de l'alpinisme.1,100/mainssl/modules/MySpace/PrdInfo.php?sn=llp&pc=2501091140001
AVEC LES FEESL'été venait de commencer quand je partis chercher les fées sur la côte atlantique. Je ne crois pas à leur existence. Aucune fille-libellule ne volette en tutu au-dessus des fontaines. C'est dommage : les yeux de l'homme moderne ne captent plus de fantasmagories. Au XIIe siècle, le moindre pâtre cheminait au milieu des fantômes. On vivait dans les visions. Un Belge pâle (et très oublié), Maeterlinck, avait dit : « C'est bien curieux les hommes... Depuis la mort des fées, ils n'y voient plus du tout et ne s'en doutent point. » Le mot fée signifie autre chose. C'est une qualité du réel révélée par une disposition du regard. Il y a une façon d'attraper le monde et d'y déceler le miracle de l'immémorial et de la perfection. Le reflet revenu du soleil sur la mer, le froissement du vent dans les feuilles d'un hêtre, le sang sur la neige et la rosée perlant sur une fourrure de mustélidé : là sont les fées. Elles apparaissent parce qu'on regarde la nature avec déférence. Soudain, un signal. La beauté d'une forme éclate. Je donne le nom de fée à ce jaillissement. Les promontoires de la Galice, de la Bretagne, de la Cornouailles, du pays de Galles, de l'île de Man, de l'Irlande et de l'Écosse dessinaient un arc. Par voie de mer j'allais relier les miettes de ce déchiquètement. En équilibre sur cette courbe, on était certain de capter le surgissement du merveilleux. Puisque la nuit était tombée sur ce monde de machines et de banquiers, je me donnais trois mois pour essayer d'y voir. Je partais. Avec les fées.1,160/mainssl/modules/MySpace/PrdInfo.php?sn=llp&pc=2401001884183